Bennet DE RIDDER - Lt-Col

Artillery Battery - Staf

 

 

 

Lieutenant-Colonel De Ridder Bennet
Artillery Battery Commander

 

OFFENSIVE BRITANNIQUE VERS ROERMOND

Les jours qui précèdent


C’est le 31 octobre,  à midi,  que le colonel BEM PIRON est convoqué au QG du VIIIme Corps britannique,  à Bree,  pour apprendre que le commandant de Corps craint une attaque de deux divisions blindées et d’une division d’infanterie dans le secteur WEERT-WESSEM.  Il va donc renforcer celui-ci et mettre en ligne la 53e Division galloise aux ordres de laquelle passe la Brigade belge.

A 19h,  le commandant de Brigade reçoit les ordres du commandant de cette Division.  Le secteur ira du Zuid-Willemsvaart (plus loin,  il s’agit du Noordkanaal) à la Meuse de MAASEIK-WESSEM.  Il met en ligne,  de gauche à droite :  la 158e Brigade à WEERT,  la Brigade belge à ELL-HUNSEL et la 71e Brigade à SANTFORT-WESSEM.  En réserve :  la 160e Brigade aux environs de BREE et la 4th Armoured Brigade (-),  reçue en renfort,  au Nord de KINROOI.
La Brigade belge reçoit la 336e Batterie Antitanks,  qui coordonnera la défense antichars dans le sous-secteur,  et les feux du 133rd Field Regiment,  R.A,  qui renforcera donc les feux de la Battery.  Le front belge est de 3,5km.

Mercredi 1 novembre

Brume et pluie.Dans les premières heures et au cours de l’avant-midi,  la 1e Unité Motorisée (les anciennes positions sont toujours occupées) intercepte une patrouille ennemie puis l’une de ses patrouilles est interceptée,  à son tour,  aux environs de l’écluse de SANTFORT.
Pendant ce temps,  les ordres sont donnés au sein de la Brigade et les reconnaissances sont exécutées.  L’après-midi se passe en relèves et changements de position.  Pour la Battery,  la zone de déploiement est juste à la frontière,  700m au Nord-Nord-Est du carrefour de GROOTBEERSEL,où se trouve le PC Brigade.  Les unités de combat sont disposées sur trois échelons.
En ligne,  la 1e Unité Motorisée au Nord (ELL) et la 3e Unité au Sud (HUNSEL).
Derrière,  la 2e Unité et la compagnie génie.  En troisième échelon,  l’Escadron d’autos blindées.La “A” Troop tire une ligne téléphonique vers le poste d’observation du capitaine Ledent quand le carrefour de HUNSEL est soumis aux feux de l’artillerie allemande(voir témoignage de Robert Georgery).

Jeudi 2 novembre

Il y a du brouillard,  aujourd’hui,  qui permet cependant l’exécution de plusieurs tirs d’artillerie au cours de l’après-midi.  Des patrouilles ont,  en effet,  été envoyées pour reconnaître l’ennemi et les unités améliorent leur mise en place au contact de l’ennemi.  C’est ainsi qu’à 15h05,  l’artillerie neutralise un élément ennemi au Sud-Est de ELL,  pendant que la 3e Unité Motorisée fait occuper un bâtiment,  utile à la défense,  par l’un de ses détachements.  A 16h30,  une patrouille est accrochée,  au centre du sous-secteur,  par un tir d’armes automatiques que les mortiers et l’artillerie tentent de réduire.

Vendredi 3 novembre 

Mauvais temps toujours.  La tête de pont ennemie sur la rive amie du canal,  dans la région de KOLDERHOF au centre du sous-secteur,  commence à être bien localisée grâce au travail incessant des patrouilles.  Celles-ci ne manquent pas de repérer des fermes occupées dans cette tête de pont,  les armes automatiques installées de part et d’autre du canal,  les défenses des deux hameaux (KELPEN et OLER) de la rive opposée,  des observatoires,  etc… Ces objectifs sont reportés sur les planchettes et sont pris à partie par les feux,  dont ceux de l’artillerie.
Vers 23h,  la 1e Unité Motorisée est attaquée par une patrouille.  Il y a des blessés de part et d’autre.

Samedi 4 novembre

A 1h32,  on acte à la Brigade que le CRA de la Division réclame les croquis d’observation…  Il fait beau aujourd’hui mais froid.  Le soir,  la 2e Unité Motorisée relève la 1e Unité.  Dans la première partie de la nuit,  la 3e Unité Motorisée est attaquée par une patrouille de vingt hommes.  Ceux-ci sont bientôt soumis à un violent feu d’infanterie et,  lorsqu’ils refluent vers leur point de passage sur le canal,  l’artillerie y intervient à deux reprises (23h20 et 23h25).

Dimanche 5 novembre

Beau temps.  Il semble que les Allemands qui font face appartiennent au Bataillon GRAFING du Régiment HERMANN.
A quatre reprises au moins,  l’artillerie est requise :  à 11h15,  tir sur un observatoire et un élément d’infanterie dissimulé dans un bosquet en face de HUNSEL;  à 12h30,  sur le point de passage du canal repéré la veille;  à 15h,  sur un autre bosquet occupé situé entre HUNSEL et GRATHEM et à 15h30,  sur un détachement ennemi au Sud de OLER.

Lundi 6 novembre

Les 1e et 2e Unités Motorisées envoient des patrouilles.  Celle de la 2e Unité part dans la soirée et s’introduit dans les tranchées de la tête de pont allemande,  enlève une mitrailleuse et deux armes antitanks.  Lors de son repli,  elle essuie des coups de feu.  L’artillerie vient à son secours en neutralisant une arme automatique installée dans une ferme de la rive opposée.

Mardi 7 novembre

Le général Dempsey,  commandant de l’Armée,  rend visite au colonel BEM Pironet s’enquiert des problèmes de la Brigade.
Journée calme.  Pour l’artillerie,  on signale qu’une équipe de lignes du 133e Field Regiment est prise à partie par des sentinelles amies,  dans la région de HALER.  Crainte d'une infiltration ennemie en profondeur,  sans doute!

Mercredi 8 novembre

De temps à autre,  l’artillerie adverse montre le bout du nez.  Hier,  c’était sur la 3e Unité Motorisée et aujourd’hui,  c’est sur la 2e Unité.
Côté belge,  deux tirs retiennent particulièrement l’attention :  tir sur un poste d’observation à OLER vers 17h10 et tir d’arrêt devant la 3e Unité attaquée par une patrouille vers 21h30.  Les actions habituelles de harcèlement se poursuivent.


Jeudi 9 novembre

C’est la 1e Unité Motorisée qui est contrebattue aujourd’hui par l’artillerie allemande.  Elle lance cependant,  vers la berge du canal,  une patrouille qui y sera accueillie par le feu.  Un peloton de la 2e Unité occupe une ferme ayant d’excellentes vues sur la rive adverse.
A 10h10,  l’observateur signale que l’artillerie a fait coup but sur le clocher de GRATHEM,  qui est décapité.


Le commandant de Brigade et son artilleur sont convoqués au QG de la 53e Division galloise à BOCHOLT.  C’est que les Britanniques vont bientôt attaquer dans le secteur. 

Insigne du 53e Welch Division. 
Insigne Highland Division

                

Deux corps entreront en action :  le VIIIme Corps au Nord et le VIIme Corps au Sud.  La 53e Division galloise passe aux ordres de ce dernier Corps avec la 7e  (US) Armoured,  la 49e et la 51e (Highland).  Les moyens sont rassemblés.  Voici ce qu’en dit le lieutenant-colonel  Bennett  De Ridder :
“A partir du 31 octobre,  le secteur –qui semblait vide- se peuple tout à coup.
Le matériel le plus moderne y arrive;  de nombreux moyens de franchissement sont concentrés immédiatement derrière le front.(…) Plus de 400 pièces d’artillerie viennent s’ajouter aux 12 canons belges.
Des munitions en grandes quantités sont déposées aux pièces et une formidable réserve d’essence est faite le long de la route BREE-LILLE-St.HUBERT.  Cette essence est en jerricans,  empilés de part et d’autre de la route.  En parcourant celle-ci en auto,  j’ai fait une estimation du nombre de litres stockés,  en comptant le nombre de jerricans par tas et le nombre de tas.
Je me rappelle que j’avais calculé qu’il devait y avoir environ 150.000 jerricans ou près de trois millions de litres d’essence.  Ce formidable dépôt n’était pas gardé,  pas plus d’ailleurs qu’en Grande-Bretagne où les carburants étaient également stockés le long des routes,  ceci en vue d’éviter de mettre le feu aux habitations en cas de sinistre.”

 

Tête de pont de Kolderhof

Le plan d’opération du Corps d’Armée prévoit l’attaque de trois divisions entre WEERT et WESSEM.  Au Nord,  la 51e ,  au centre,  la 53e  et au Sud,  la 7th Armoured.  Les deux divisions d’aile vont relever les brigades en ligne de la 53e Division galloise qui attaquera à travers le sous-secteur belge.  Après franchissement du canal de WESSEM,  ces divisions devront exploiter vers la Meuse de ROERMOND à VENLO.  Le rôle de la Brigade belge est de faciliter les reconnaissances,  d’éliminer la tête de pont de KOLDERHOF et d’organiser l’observation au-delà du canal.  La Battery participera à l’appui jusqu’à limite de portée,  comme elle l’avait fait pour MARKET GARDEN…



Vendredi 10 novembre
Des patrouilles britanniques sont guidées par les Belges vers les points de passage possibles.

Samedi 11 novembre
Il fait beau comme hier.  C’est aujourd’hui que le commandant de Brigade a décidé de mener l’attaque de la tête de pont.  Il donne ses ordres à 11h.
C’est la 2e Unité Motorisée qui doit attaquer,  appuyée par tous les feux disponibles.  L’heure d’attaque est prévue à 18h mais on annonce,  à 14h,
qu’elle sera retardée d’une demi-heure.  Ce sera donc à 18h30.

La préparation d’artillerie ne durera que 5 minutes mais elle s’abattra massivement sur la tête de pont.  A l’heure H de l’attaque,  les tirs seront  reportés 200m au-delà du canal pour empêcher,  pendant 20 minutes,  tout appui à la tête de pont.  En cas de succès,  trois fusées vertes seront lancées.
C’est l’équipe d’observation de la “C” Troop,  menée par le lieutenant Emile Siebenhaler,  qui est désignée pour accompagner le peloton d’attaque de la 2e Unité Motorisée.

A 18h25,  le plan des feux est déclenché et les tirs à l’horaire de préparation et d’accompagnement durent jusqu’à 18h49.  A 19h,  trois fusées vertes annoncent le succès.
Peu avant l’attaque,  le commandant de Brigade et son artilleur s’étaient portés sur la position de départ.  L’attaque lancée,  ils constatent que la tête de pont n’est pas occupée puisque la réaction vient uniquement de la rive adverse :  tirs de mortiers et de grenades.  Cette riposte éloignée va durer jusqu’à 20h30.

A 22h,  le commandant de Brigade demande encore deux tirs d’artillerie sur des canons repérés à l’Est d’OLER.
Les artilleurs des équipes d’observation et de lignes se sont particulièrement distingués au cours de cet assaut.  Le lieutenantEmile Siebenhaler,  Alfred
Weisgerber,  Jean Claus,  Léon Nicolas,  Camille Ludwig,  Pierre Flammang et Mathias Groeffseront cités à l’Ordre du Jour de la Brigade.

Lt. Siebenhaler 
Sdt. Weisgerber
Sdt. Claus  
Sdt. Nicolas
Sdt. Ludwig      
Sdt. Groeff

                                      
Le lieutenant Siebenhaler et Alfred Weisgerber ont accompagné le peloton d’assaut de la 2e Unité Motorisée.  Lorsqu’il y a des blessés,  ils aident à leur évacuation sous le feu de l’ennemi.  Le sous-lieutenant Rogge,  chef du peloton d’assaut,  est parmi les blessés.  Il est chargé dans la jeep d’Alfred Weisgerber.

L’adjudant Silberman,  RSM de la 2e Unité Motorisée,  monte à côté de lui pour le conduire à l’arrière.  Malheureusement,  pendant le trajet,  la jeep saute sur une mine.  L’officier et le sous-officier sont tués tandis que le chauffeur est grièvement blessé.Jean Claus,  Léon Nicolas,  Camille Ludwig,  PierreFlammang et Mathias Groeff ont,  eux,  posé et réparé la ligne téléphonique au cours de l’attaque,  faisant fi des feux adverses,  malgré leur intensité.
(voir témoignages Wuyckens Henri et Silberman Robert).

Dimanche 12 novembre

C’est aujourd’hui qu’était planifiée l’offensive britannique.  Elle sera postposée de deux jours.  Il fait mauvais et il y a de la boue.
La Brigade coopère aux opérations préliminaires à l’attaque.  A 14h, la 2e Unité Motorisée signale que 93 mines antipersonnel ont été enlevées dans son quartier,  dont 15 par le lieutenant Siebenhaler de la Battery.  Dans l’après-midi,  la 336e Batterie Antitank est soumise à la contrebatterie adverse.

Lundi 13 novembre

A 13h45,  les Belges fournissent de nouveaux guides pour des patrouilles britanniques.  Vers 19h,  trois obus de 105mm tombent sur la position de la Battery,  heureusement sans faire de victimes.

Mardi 14 novembre

La Brigade mène encore quelques activités de patrouille.

C’est aujourd’hui le grand jour.  Le commandant de la 53e Division galloise vient remercier la Brigade pour son appui dans les préparatifs de l’attaque.
Vers 16h,  l’opération commence pour la 51e Division (à gauche) tandis qu’à la 53e,  a lieu l’amincissement du dispositif,  suivi par les relèves.
C’est pourquoi les premiers tirs de la Battery sont signalés vers 15h55.  Mais l’essentiel du plan des feux en appui de la 53e Division sera tiré dans la soirée.

Voici comment le CPO résume la journée :
“Calme avant la tempête.  Infanterie est relevée.  Nous seuls (Artillerie) restons.  18h :  début de l’opération pour rejeter l’ennemi au-delà de la Meuse,  secteur ROERMOND.  Grand show et grand bruit.  20h :  heure H pour notre secteur (Ndlr :  D’autres sources donnent 22h).  Tirs à partir de H-30.   400 coups par pièce.  2000 coups par minute sur l’ensemble du front.  20h30 :
Lance-flammes,  artificial moonlight”C’est la 160e Brigade qui passe à l’assaut des points d’appui du canal de WESSEM dans la région de GRATHEM. 
Elle met en ligne deux bataillons (4th Welch à gauche et 2nd Monmouthshires à droite).  A partir de minuit,  ceux-ci sont dépassés sur la rive Est par le 6th Royal Welch Fusiliers qui,  après une brève préparation d’artillerie,  atteint les objectifs fixés pour la nuit,  malgré les champs de mines et les feux adverses.

Insigne Royal Welch Fusiliers
Insigne 7th (US) Armoured Division


Mercredi 15 novembre

Le succès du franchissement de la 160e Brigade est acté à l’aube.  De jour,  le 6th Royal Welch Fusiliers poursuit son attaque,  pour s’emparer de GRATHEM à 18h30,  et faire jonction,  dans la soirée,  avec la 7e (US) Armoured Division qui s’est emparée,  la nuit précédente,  de l’ouvrage hydraulique de PANHEEL contrôlant les eaux du canal de WESSEM.

La 2e phase de l’attaque peut commencer maintenant.  Elle est confiée à la 158e Brigade qui s’empare,  de nuit et sans difficulté,  de la localité de BAEXEM.
Pendant toute la journée,  la Battery appuie massivement ces actions.

Jeudi 16 novembre

Mauvais temps,  comme la veille d’ailleurs.  Il gèle légèrement.  Aujourd’hui encore,  la Battery intervient à plusieurs reprises pour appuyer la troisième phase de l’attaque vers la Meuse.  La 71e Brigade occupe de jour la région de HORN,  face à ROERMOND,  tandis que la 158e Brigade poursuit son exploitation vers NUNHEM et BEGGENUM,  plus au Nord,  et que la 160e Brigade s’empare de HEEL et de BEEGDEN,  entre WESSEM et ROERMOND.
Dans la soirée,  la Battery se trouve hors portée,  mission accomplie.

Vendredi 17 novembre

La Brigade belge au complet est retirée du front.  Destination :  LOUVAIN,  où elle va prendre du repos avant de se réorganiser.

 

Extrait :
“L’Artillerie Belge en Grande-Bretagne et dans les Combats de la Libération”
1941-1945
FIRST BELGIAN FIELD BATTERY (REGIMENT)
Par Lt. Col BEM er J. GELARD

mise en page par Didier Dufrane